Eric Marlière a enquêté plusieurs années au cœur des banlieues et donne la parole aux jeunes dans un livre, La France nous a lâchés !(Fayard). Habile mélange entre témoignages et analyses, cet ouvrage montre de l’intérieur les représentations sociales des « jeunes des cités ».
Des paroles véhémentes
Tour à tour, leurs relations avec la police, les travailleurs sociaux et l’école y sont étudiées ; ainsi que leur vision de la politique (« théorie du complot »). Le constat est accablant, car « leurs paroles véhémentes cachent mal, en réalité, un sentiment de désolation, de désespoir, d’oppression et même d’insécurité dans ces quartiers populaires de France ».
« Ils nous envoient la police pour nous humilier. Même quand t’es diplômé, ils te donnent un balai pour travailler ! » (26 ans, jeune issu de l’immigration algérienne, étudiant en DESS à l’université Paris-XIII).
Le sentiment d’injustice est d’autant plus grand qu’« ils se sentent citoyens français à part entière ; c’est pourquoi le discours sur l’intégration est humiliant pour la plupart d’entre-eux », estime le sociologue.
Nés en France, ils attendent de notre société les mêmes droits que les « français de souche ». Et là réside tout le problème car ces jeunes ont « intériorisé le fait que leur avenir dans la société était compromis et incertain ». Surtout depuis la scène du kärcher qu’ils n’ont évidemment pas oubliée